En effet, après deux années de pandémie à se battre pour maintenir la tête hors de l’eau, nos institutions de soins sont encore très fragilisées. Elles doivent maintenant faire face à une augmentation conséquente de leurs factures énergétiques, mais aussi à une hausse importante des coûts salariaux due à l’inflation. À cela s’ajoute une flambée des prix des biens et des matériaux de construction et des taux d’intérêts. Sans oublier la pénurie de personnel qui pousse certains hôpitaux à fermer des services.
Un niveau d’activité encore faible
L’activité de nos hôpitaux n’a pas retrouvé son niveau d’avant Covid. Les admissions classiques accusent un retard de 9,3% en 2021 et de 8,6% au premier semestre 2022 par rapport à leur niveau d’avant pandémie, en 2019. Le nombre d’admissions en baisse a des répercussions sur le taux d’occupation.
Le niveau des admissions en hospitalisation de jour chirurgicale remonte plus rapidement que celui des hospitalisations classiques mais reste néanmoins inférieur à ce qu’il était il y a trois ans (-2,1%). Par contre, les résultats 2021 montrent une tendance de plus en plus accrue à l’hospitalisation de jour non chirurgicale. Ainsi, le nombre d’admissions en hôpital de jour médical (oncologie, dialyse, etc.) a augmenté de 7,1% en 2021 et de 8,6% pour le premier semestre 2022 par rapport à l’année 2019.
Un résultat courant qui reste fragile
Sans les avances de trésorerie de 2 milliards d’euros accordées par le gouvernement suite à la baisse d’activité liée au Covid 19, les hôpitaux se seraient retrouvés quasiment tous dans le rouge en 2020. En 2021, l’impact de l’intervention fédérale est moins déterminant. D’après les estimations fournies par les hôpitaux généraux, «seuls» 129 millions seraient conservés par le secteur en 2021, après régularisation des montants octroyés. Ce montant permet tout de même d’afficher un résultat courant positif de 127 millions d’euros en 2021. En termes relatifs (en % du chiffre d’affaires), cela reste inquiétant de se situer sous la barre des 1% (0,71% en 2021 et 0,48% en 2019).
Ce résultat courant légèrement positif résulte d’une combinaison de deux hausses importantes : celle du chiffre d’affaires (+9,8% en 2021 par rapport à 2019) et celle des coûts d’exploitation (+10,1%). La croissance importante du BMF (environ 35% du chiffre d’affaires) s’explique notamment par l’adoption de mesures de réinvestissement dans la qualité des soins et du personnel soignant par le Fédéral.
Cependant, le résultat courant n’est pas en positif pour tout le monde : 26 instituions affichent un résultat courant négatif. Ce chiffre diminue à 16 lorsqu’on parle du résultat de l’exercice. Plus alarmant encore, 13 hôpitaux généraux n’ont pas un cash-flow suffisant pour couvrir leurs dettes à LT échéant dans l’année.
Le manque de personnel ne cesse de s’aggraver
La pénurie de personnel soignant est telle que le recours au personnel intérimaire a progressé de près de 75% depuis 2019. Le taux d’absentéisme a quant à lui atteint près de 10% en 2021. Parmi ces 10%, 6,1% peuvent être qualifiés d’absentéisme de longue durée (> 30 jours).
Face à ce manque criant de travailleurs, certains hôpitaux sont contraints de fermer des unités de soins.
2022, annus horribilis pour nos institutions de soins ?
Même si les hôpitaux ont pu tenir le coup en 2021, l’exercice s’annonce plus difficile en 2022. L’inflation que nous connaissons en ce moment implique une augmentation des salaires, une envolée des prix de l’énergie, des biens et des coûts de construction ainsi que de beaucoup d’autres achats indispensables à notre secteur.
Selon l’extrapolation des résultats du premier semestre 2022 réalisée par Belfius, les hôpitaux généraux connaîtront une détérioration de leur résultat courant de 135 millions d’euros au premier semestre 2022 et donc, de minimum 270 millions sur l’ensemble de l’exercice 2022, soit un résultat déficitaire pour le secteur hospitalier. Dans un scénario plus pessimiste concernant le 2ème semestre 2022 envisagé par Belfius, la détérioration du résultat courant s’élèverait à 400 millions d’euros au terme de l’année 2022.
L’année 2022 s’annonce également pauvre en investissements de la part des hôpitaux. Cela s’explique notamment par le contexte inflationniste et incertain du moment. Belfius estime insuffisant le niveau actuel des investissements du secteur de la santé pour préparer les hôpitaux belges à l’organisation des soins du futur, tout en réduisant leur empreinte environnementale et en améliorant leur cybersécurité.