Les soins palliatifs, ou comment prendre soin sans guérir

Les soins palliatifs souffrent d’une image assez morose car associés à la mort, ils font peur. Pourtant, bien plus que n’importe quel autre type de soins, ils sont une réelle ode à la vie. Au-delà de soins de confort, ce sont des soins profondément humains qui permettent aux patients de traverser la dure épreuve de la maladie avec calme et sérénité. Véronique Legros, Médecin référent en Soins continus - Soins palliatifs au Centre Hospitalier Reine Astrid de Malmedy (CHRAM), lève le voile sur ces soins encore trop souvent jugés comme « tabous ».

Un accompagnement complet

Généralement, les soignants ont pour vocation principale de soigner, certes, mais surtout de guérir les patients. Malheureusement, il arrive que cela s’avère impossible car la personne est atteinte d’une maladie grave et incurable. Lorsque les soins curatifs ne sont plus possibles, le patient peut se tourner vers les soins palliatifs qui, selon le Dr Legros, ont l’avantage d’intégrer une dimension globale : « Cicely Saunders, femme médecin britannique, qui a créé les soins palliatifs, a amené cette notion de souffrance globale avec une prise en compte de la douleur physique mais aussi de la souffrance psychologique, sociale et spirituelle et pour moi, c’est tout cela qui fait la richesse des soins palliatifs. Cette approche globale a pour objectif de rencontrer les souhaits et les besoins du patient et de ses proches. »

L’année 2016 marque un tournant dans l’histoire des soins palliatifs en Belgique car une nouvelle loi, modifiant celle du 14 juin 2002, est venue élargir leur définition initiale. Cette nouvelle définition souligne notamment le fait que les soins palliatifs ne sont pas uniquement destinés aux personnes en fin de vie et qu’ils peuvent donc intervenir bien plus tôt dans le trajet de soin du patient. « Le cancer par exemple fait partie de ce type de maladies prises en charge en palliatif mais c’est devenu une maladie chronique. De ce fait, seul un oncologue est habilité à déterminer si le patient est palliatif ou non. Il pourra ainsi affirmer qu’il est fort probable que le patient meurt de son cancer mais il ne pourra jamais dire à quel moment. De manière générale, nous remarquons que les gens vivent de plus en plus longtemps et ce, même s’ils ont des maladies mortelles. Il est donc important de prendre cela en compte et de proposer un recours aux soins palliatifs bien plus tôt. »

Etant donné qu’il n’est pas toujours simple de qualifier un patient de « palliatif », un outil a spécialement été développé à cet effet par le secteur des soins palliatifs en collaboration avec les universités. Prenant la forme d’un questionnaire, l’outil « PICT » permet aux soignants d’identifier plus facilement et plus précocement les patients palliatifs : « L’outil PICT a été développé il y a à peu près deux ans. Concrètement, il pose la question de la fragilité du patient et de l'incurabilité d'une affection potentiellement mortelle du patient. La première question adressée au soignant est « Seriez-vous étonné(e) d’apprendre que le patient décède dans l’année ? ». S’il répond « Non » à cette question, alors il faut se demander si le patient n’est pas à considérer comme palliatif. Par la suite, il y a toute une série d’autres questions qui permettent d’affiner le profil du patient concerné. Cela dit, cet outil n’est pas systématiquement utilisé. Il y a beaucoup de choses qui se font au feeling aussi. »

Comme pour toute autre discipline médicale, les soins palliatifs avancent et les connaissances ainsi que les pratiques les concernant évoluent constamment. En plus de la mise en place de l’outil PICT, la création de guidelines, par la Fédération Bruxelloise de Soins Palliatifs et ses partenaires, sous forme d’un site web, constitue une autre avancée majeure en la matière. 

Des soins pour la vie    

L’entrée dans un trajet de soins purement palliatifs est souvent vécue comme un coup dur pour les patients. Dès l’annonce de cette possibilité, ils doivent faire le deuil d’une potentielle guérison. Certains peuvent même avoir l’impression d’être abandonnés par les équipes soignantes. Le Dr Legros tient cependant à rappeler que les soignants se tiennent toujours à disposition des patient pour les conseiller et les accompagner dans leur démarche : « En tant que soignant, nous aidons les patients à se questionner sur ce qui semble bon et juste pour eux en termes de traitement. Dans tous les cas, nous leur disons qu’il n’y pas d’obligation à se battre à tout prix, qu’ils peuvent se demander si c’est bénéfique pour eux de continuer ou pas. Nous les invitons à prendre en compte la possibilité de mettre un stop à des thérapeutiques lourdes qui amènent de l'inconfort, pour continuer à vivre ce qu’ils ont à vivre autrement, en favorisant la qualité de vie. »

Le Dr Legros évolue au sein d’une équipe mobile de soins palliatifs, dont le travail est sensiblement différent de celui des unité de soins palliatifs. En effet, une équipe mobile est composée de plusieurs professionnels de santé, qui ont pour fonction de se rendre au chevet d’un patient hospitalisé au sein de n’importe quelle unité de l’hôpital. « L’équipe est constituée d’un médecin, d’une infirmière et d’une psychologue. Nous travaillons également en lien avec le service social. Nous sommes là en support pour les médecins et les infirmiers de première ligne. Nous sommes donc dépendants de ceux-ci qui nous appellent selon les besoins. Le patient et sa famille peuvent également faire appel à nous mais ils doivent toujours passer par le médecin référent de première ligne du patient. ». L’équipe de soins palliatifs du CHRAM est ainsi dotée de diverses missions. « Il y a toujours une demande émise par le médecin référent du patient. Suite à cette demande, nous proposons une prise en charge globale en intégrant les pôles physique, psychologique et social, spirituel et existentiel. Nous travaillons sur la gestion de la douleur et des symptômes d’inconfort ou sur l’organisation d’un retour à domicile avec la mise en place des soins palliatifs à la maison par exemple. Nous souhaitons au maximum accompagner le patient dans ce qu’il vit. »

Là aussi, la COVID-19 a tout chamboulé

Suite à l’apparition de nouveaux types de patients atteints par la COVID-19, le Dr Legros a développé un protocole qui leur est expressément dédié. Ce document reprend une série de facteurs de risque surajoutés. « L’âge, les comorbidités, l’état cognitif, le degré de fragilité, l’autonomie et l’état nutritionnel sont des choses que nous devons avoir en fond d’écran lorsque nous allons à la rencontre du patient. Il est important d’avoir une vue globale et ne pas se concentrer uniquement sur une seule problématique. »

Après avoir exercé en tant que médecin généraliste puis travaillé au sein du service des Urgences du CHRAM, le Dr Véronique Legros a pu, à la suite d’une belle opportunité, renouer avec un type de soins qu’elle a toujours affectionné lors de sa pratique générale. Aujourd’hui, médecin référent en Soins continus - Soins palliatifs de l’établissement, elle se sent privilégiée de pouvoir réaliser ce type d’accompagnement aux côtés des patients. « Je pense qu’il faut une certaine expérience de vie personnelle pour pouvoir travailler dans ce domaine. Ce qui me plaît beaucoup c’est la vision globale dont le volet spirituel qui renvoie aux besoins existentiel et relationnel. Le lien avec les patients est à chaque fois unique. » De plus, à l’heure où la pandémie nous accable toujours autant, elle rappelle l’importance des liens sociaux : « Je suis surprise de voir comment la mort est balayée pour le moment. Au cours de la crise au printemps, j’ai été remise en première ligne aux urgences, tout comme ma collègue infirmière. Il n’y a donc plus eu d’accompagnement palliatif en raison des mesures sanitaires très strictes imposées. Le lien patient-famille a été coupé et les malades disaient au revoir à leurs proches via des outils digitaux. C’était abominable. Pour moi, ce genre de choses ne devrait plus jamais se reproduire. Il y a eu une souffrance énorme au cours de ces derniers mois, tant du côté des patients que du côté des familles. L’enjeu principal est de pouvoir remettre du lien et surtout de faire en sorte qu’il ne soit plus jamais coupé. Notre défi au quotidien est de permettre aux patients de vivre ce qu’ils ont à vivre et ce dans des conditions correctes et humaines. C’est l’essence même des soins palliatifs. »

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