Malgré une baisse de la consommation depuis 40 ans, l’alcool reste le psychotrope le plus consommé en Europe. Un Belge consomme en moyenne près de 10 litres d’alcool pur par an, l'équivalent de plus de 100 bouteilles de vin, ou de plus de 200 litres de bière d’intensité moyenne – ce qui est presque deux fois supérieur à la moyenne mondiale (1). Chez nous toujours, le coût social du mésusage de l’alcool a été estimé à 4,2 milliards d’euros par an, alors que les bénéfices liés à l’alcool s’élèvent au total à 1,5 milliard d’euros, incluant les accises et les recettes de l’industrie (2).
Les mineurs en consomment trop
En Belgique, environ 6 jeunes âgés de 12 à 17 ans sont admis chaque jour à l'hôpital en raison d'une consommation abusive d'alcool (3). C'était le constat tiré en 2019, lors d’une enquête réalisée par l'Agence Intermutualiste (AIM). L’institution dénombrait pas moins de 2 234 cas d’enfants admis aux urgences pour avoir trop bu en 2018. Les très jeunes (12 et 13 ans) étaient 116 à avoir été hospitalisés sous l’emprise de l’alcool. À titre d’exemple, c’est trois fois plus qu’aux Pays-Bas. L’étude soulignait également que les consommations plus régulières et plus susceptibles de poser des problèmes (surconsommation, binge drinking, usage quotidien) sont plus fréquentes chez les garçons que chez les filles (4).
Le plan interfédéral prévu pour le mois prochain prévoit entre autres l’interdiction de vente d’alcool dans les distributeurs automatiques, dans les magasins des hôpitaux, mais aussi la nuit, dans les magasins situés le long des autoroutes.
D’autres mesures visent plus précisément les jeunes :
1) Interdire la vente d’alcools forts aux 16-18 ans
Le ministre de la Santé, Frank Vandenbroucke (Vooruit), précise dans un communiqué que cette mesure a pour objectif de clarifier la législation : “Aujourd'hui, il y a encore trop de discussions sur la question de savoir qui peut acheter quels types de produits alcoolisés. C'est dû au fait qu'aujourd'hui, la distinction est faite en fonction du mode de production. Cependant, le marché a évolué et il existe de nombreux produits alcoolisés hybrides ou mixtes. Par exemple, le personnel d'un bar ne sait pas toujours ce qu'il peut vendre à qui. Nous faisons le même constat dans les magasins de nuit”.
2) Réglementer strictement la publicité pour l’alcool destinée aux mineurs
La mesure vise à interdire la publicité pour l’alcool à la radio, à la télévision, au cinéma, et dans les médias papiers et digitaux qui visent principalement un public mineur d’âge.
3) Proposer un parcours de soins pour les adolescents et les jeunes adultes
Enfin, le gouvernement indique dans son communiqué vouloir élaborer, en partenariat avec les membres du réseau Soins de santé mentale (5), un trajet de soins “alcool”, spécifiquement destiné aux adolescents et aux jeunes adultes. Lorsque le groupe cible arrive aux urgences suite à une consommation excessive ou à un accident sous influence, le personnel de l’hôpital lui proposera un trajet de soins auquel les parents sont également associés. Ce parcours se fera pendant et après l’hospitalisation.
L’Université d’Anvers est elle aussi en train d’étudier le sujet. Elle souhaite mettre en place prochainement une polyclinique spécialisée dans l’abus d’alcool chez les jeunes. L'université belge s’est pour cela inspirée de ce qui se fait déjà aux Pays-Bas. Nos voisins proposent en effet un suivi multidisciplinaire aux mineurs tombés dans un coma éthylique. Juste après leur reprise de connaissance, lors de ce que l’on appelle “l’heure dorée”, ils sont placés devant un ordinateur et doivent répondre à un questionnaire sur leur consommation d’alcool. Cette “heure dorée” serait en effet le moment le plus propice (6) pour que les jeunes prennent conscience de leurs actes. Les parents sont ensuite appelés et on leur communique le bilan. Un parcours psychologique de deux mois est prévu par la suite.
(1) : ASBL Jeunes et alcool, “Les consommations”, https://www.jeunesetalcool.be/lalcool/les-consommations/
(2) : Lieven Annemans, UGent, “Uitwerken van een methodiek voor de evaluatie van het drugbeleid in België, in de sector gezondheid”, https://belspo.be/belspo///fedra/proj.asp?l=fr&COD=DR%2F13
(3) : La consommation abusive est définie par quatre verres d'alcool en deux heures pour une femme et six pour un homme selon l'Association flamande pour les problèmes d'alcool et autres drogues (VAD). Cette pratique est également appelée “binge drinking”.
(4) : ASBL Jeunes et alcool, “Les consommations”, https://www.jeunesetalcool.be/lalcool/les-consommations/
(5) : Réseaux de soins en santé mentale pour adultes, https://www.belgiqueenbonnesante.be/fr/donnees-phares-dans-les-soins-de-sante/soins-en-sante-mentale/soins-en-sante-mentale-pour-adultes/organisation-de-l-offre-de-soins-pour-adultes/reseaux-de-soins-en-sante-mentale-pour-adultes
(6) : RTBF, “La première polyclinique belge d’alcoologie pour mineurs verra le jour à Anvers”, https://www.rtbf.be/article/la-premiere-polyclinique-belge-dalcoologie-pour-mineurs-verra-le-jour-a-anvers-10943214
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