Recherche en cancérologie : la Belgique sur le toit du monde

Consommation d’alcool et de tabac, facteurs environnementaux ou encore prédispositions génétiques constituent quelques-uns des principaux facteurs de risque de cancer. Cette maladie constitue l’un des problèmes de santé publique majeurs nécessitant, de par la multitude et la complexité de ses formes, toujours plus de recherches. Certains établissements de soins belges font, grâce à leurs travaux, partie des acteurs mondiaux incontournables de la lutte contre le cancer. Focus sur les récentes réalisations de l’Hôpital de Libramont ainsi que de celles de l’Institut Jules Bordet.

Un combat (inter)national

Selon l’Organisation mondiale de la Santé, le cancer est la deuxième cause de décès dans le monde. En Belgique, 70.468 cas de cancers ont été diagnostiqués en 2018[1]. Il est par ailleurs estimé qu’un homme sur trois et une femme sur quatre contracteront un cancer avant l’atteinte de leurs 75 ans chez nous. Au vu de ces quelques données, il est évident que les politiques nationales et internationales couvrant la prévention, le traitement et la recherche en la matière sont d’une importance capitale. C’est pourquoi, en 2008, la ministre des Affaires sociales et de la Santé publique belge en poste à l’époque, Laurette Onkelinx, décida de donner un nouveau souffle à la lutte contre le cancer en Belgique et lança le « Plan Cancer », un plan d’action se déclinant en 78 mesures qui a permis de considérablement améliorer la qualité des soins apportés aux patients cancéreux. Aujourd’hui, le Plan Cancer n’est plus actif, mais un suivi de la « Politique Cancer » est assuré par le Centre du Cancer de Sciensano. Par ailleurs, début 2021, la Commission européenne a annoncé la mise en place d’un « Plan européen pour vaincre le cancer » destiné à soutenir l’ensemble des États membres de l’Union européenne. Au travers de ce plan, l’UE propose des mesures concrètes visant à atténuer les effets de la pandémie de la COVID-19 sur les soins du cancer et à soutenir les améliorations structurelles permettant une prise en charge plus durable de la maladie. De plus, l’organisme prévoit d’allouer une aide financière de quatre millions d’euros aux États membres afin de soutenir leurs initiatives.

La recherche, l’espoir de vaincre

Bon nombre de spécialistes s’entendent pour dire que la recherche constitue le nerf de la guerre contre la maladie. La Belgique fait d’ailleurs partie des pays les plus performants en matière d’innovation et cela est notamment dû à l’investissement financier conséquent de l’industrie biopharmaceutique belge dans la recherche et le développement. Dans un rapport paru en juin 2021, Pharma.be indique qu’en 2020 les entreprises faisant de la recherche fondamentale ont investi 4,96 milliards dans le secteur de la R&D, ce qui représente une augmentation de 29,1% par rapport à 2019. Cependant, pour pouvoir mener leurs études à terme, les entreprises pharmaceutiques se doivent de collaborer avec le terrain, c’est-à-dire des prestataires de soins, des institutions de soins et des organisations de patients par exemple pour s’assurer de la viabilité et de la fiabilité des traitements proposés. Au chevet des patients, les hôpitaux sont des partenaires privilégiés pour l’industrie. « 90% du budget de la recherche provient de l’industrie pharmaceutique. Ce sont donc les entreprises pharmaceutiques qui développent les médicaments, mais la chose qu’elles ne savent pas faire, c’est expérimenter sur des patients. Pour cela, ils font appel aux hôpitaux, via les CRO[2], qui ont une équipe de recherche, ce qui est notre cas. », explique le Dr Frédéric Forget, médecin-chef du service d’oncologie de l’Hôpital de Libramont.

Les recherches et les études cliniques menées au sein des établissements hospitaliers sur les patients atteints d’un cancer peuvent donc mener à d’importantes avancées dans le domaine. Dernièrement, le service de recherche en oncologie de l’Hôpital de Libramont, supervisé par le Dr Forget, s’est justement donné pour mission de tester et d’étudier les effets de deux nouveaux traitements, l’un destiné aux patientes atteintes d’un cancer du sein et l’autre destiné aux patientes atteintes d’un cancer du col de l’utérus. Après plusieurs mois de recherche, les « clinical coordinator » de l’établissement ont pu participer à la rédaction de deux articles qui ont été publiés dans The Lancet et dans le Journal of Clinical Oncology, deux revues scientifiques de renommée internationale. « Nous sommes très fiers d’avoir pu participer au comité de rédaction de ces deux articles. Tous les hôpitaux de Vivalia se sont mis ensemble pour pouvoir recruter des patients sur l’ensemble de la Province du Luxembourg, et le travail a payé. Ce n’est pas tous les jours que nous publions dans de telles revues. », se réjouit le Dr Forget. Investie depuis plus de 15 ans dans la recherche, l’équipe de recherche de l’Hôpital de Libramont n’a pas chômé et cumule, rien que pour cette année, cinq publications scientifiques dans diverses revues. La publication ne semble pourtant pas être la finalité en soi. Selon le Dr Forget, le fait de participer à une étude clinique permet de contribuer à l’avancée dans la lutte contre le cancer et d’avoir la primeur de molécules innovantes : « ll y a dix ans, nous soignions moins bien le cancer qu’aujourd’hui, dans dix ans nous le soignerions encore mieux. Participer à une étude clinique permet d’utiliser les médicaments qui seront probablement remboursés dans cinq ou dix ans. », souligne-t-il.

En quête de connaissance sur la maladie, les établissements hospitaliers peuvent spontanément entreprendre des travaux menant parfois à des avancées significatives. C’est notamment le cas de l’Institut Bordet, centre de référence de lutte contre le cancer. « Nous disposons d’une structure unique en Belgique nous permettant de développer de A à Z un nouvel essai clinique académique dont l’Institut est le promoteur. Au départ d’une idée pour un nouveau traitement, nous écrivons le protocole, nous recherchons les fonds pour financer l’étude, nous soumettons le projet aux autorités, nous l’implémentons dans notre hôpital, mais également dans d’autres hôpitaux qui participent à notre étude, nous monitorons et analysons les données, etc. En bref, nous sommes capables de mener nos propres études de manière complètement indépendante. », détaille le Dr Laurence Buisseret, oncologue et chercheuse à l’Institut Jules Bordet.

Après un léger moment de flottement dû à la survenue de la crise de la COVID-19, les activités de recherche et les études cliniques ont repris de plus belle au sein de l’établissement. Certaines recherches ont d’ailleurs porté sur l’impact de la maladie de la COVID-19 sur les patients atteints d’un cancer. « Nous avons mis en place des études pour essayer de mieux comprendre et analyser les interactions entre la COVID-19 et le cancer. Nous avons également participé à des initiatives nationales et internationales publiées sous forme de recommandations pour adapter les traitements oncologiques pendant cette pandémie. », indique le Dr Laurence Buisseret. « Notre service des maladies infectieuses a fourni un gros travail au sujet de la protection des patients cancéreux vis-à-vis de la COVID-19, visant à fournir aux cliniciens des données scientifiques utiles pour mieux prendre en charge les patients. Les équipes médicales et paramédicales ont vraiment travaillé de manière coordonnée. », complète le Dr François-Xavier Otte, radiothérapeute à l’Institut Jules Bordet.

Créé en 1939, l’Institut Jules Bordet reste à l’heure actuelle le seul hôpital oncologique intégré en Belgique. Pionnier dans de nombreux domaines et mondialement reconnu, l’établissement se prépare dans les mois à venir à passer une nouvelle grande étape qui va incontestablement asseoir sa position de leader. « En novembre 2021, nous nous apprêtons à changer de maison. Nous allons déménager au sein d’un tout nouvel hôpital. La construction de cet hôpital constitue une réelle prouesse. », annonce le Dr Otte. Bientôt situé sur le campus de l’ULB, à côté de l’Hôpital Erasme, l’Institut Jules Bordet écrit un nouveau chapitre de son histoire et entend initier de nouveaux projets prometteurs y compris dans le domaine de la recherche. « L’hôpital que nous venons de construire est à la pointe en termes de recherche de la qualité et du développement de soins. Nous allons également allier nos forces à celles de l’Hôpital Erasme. Être présent sur le site de l’université nous offre aussi la possibilité de disposer d’un grand parc de laboratoires dont certains dédiés à la cancérologie, ce qui permettra d’accélérer la recherche contre le cancer. Par ailleurs, un étage entier de l’hôpital sera consacré aux recherches en laboratoire. Ce pôle nommé BCRL (Bordet Cancer Research Laboratories) permettra de rassembler l’ensemble de nos activités de recherche sur un même lieu. »

Grâce au travail des scientifiques et des médecins aidés par la précieuse collaboration des patients, le cancer ne rime plus forcément avec fatalité et les chances de survie au cancer, bien que variant d’un patient à l’autre selon un bon nombre de spécificités qui lui sont propres, augmentent grâce aux nouveaux traitements et aux nouvelles technologies utilisées. Le combat est bien loin d’être terminé, mais le dévouement quotidien des équipes de soins et de recherche offre une note d’espoir et d’optimisme quant à l’avenir.

[1] Chiffre communiqué par la Fondation Registre du Cancer. Année d’incidence 2018 (année disposant des données les plus récentes).

[2] « Contract Research Organization » ou « Société de recherche contractuelle » en français : Entreprise qui fournit, sur une base contractuelle, des services dans le domaine de la recherche biomédicale pour l'industrie pharmaceutique ou biotechnologique ainsi que pour les organismes de recherche publics ou parapublics qui œuvrent dans ce domaine.

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